Après un Premier ministre issu de la diversité, Rishi Sunak, élu en octobre dernier suite à la démission de Liz Truss (49 jours en fonction), le Royaume-Uni doit composer aujourd’hui avec un nouveau dirigeant lui aussi issu des minorités ethniques: Humza Yousaf, nouveau Premier ministre d’Écosse, musulman, indépendantiste et d’origine pakistanaise.
Depuis très longtemps, le Royaume-Uni à un rapport à la multiculturalité beaucoup plus large que nos pays d’Europe continentale. Très tôt, dès les années 1960, les gouvernements britanniques successifs ont choisi une politique du multiculturalisme pour reconnaitre et valoriser la diversité de la population. Leitmotiv imprégné dans les mentalités ? L’ambition de promouvoir l’égalité des droits et des chances pour tous, quelle que soit son origine. Cette politique, mise en place pour favoriser l’intégration des minorités ethniques et culturelles dans la société britannique, porte ses fruits. En Écosse Humza Yousaf a été officiellement élu Premier ministre lors d’un vote au Parlement local fin du mois de mars, devenant ainsi le premier dirigeant issu de l’immigration et musulman.
Humza Yousaf, dont les grands-parents paternels avaient immigré du Pakistan à Glasgow il y a 60 ans, a pris ses fonctions le 28 mars dernier après avoir été officiellement nommé à ce poste par mandat royal et prêté serment devant la « Court of Session », la Cour suprême écossaise. La veille, il se hissait à la tête du Parti national écossais qui revendique l’indépendance de l’Écosse annexée à l’Angleterre depuis… le 1er mai 1707.
Âgé de 37 ans, le nouveau Premier ministre a promis une politique plus agressive pour l’indépendance de l’Écosse.
Yousaf et ses partisans de l’indépendance affirment que leur nation serait mieux lotie en tant que pays indépendant, car il pourrait prendre ses propres décisions sur les questions économiques, politiques et sociales, et serait mieux en mesure de protéger ses intérêts et de représenter ses citoyens sur la scène internationale.
Le nouveau Premier ministre, dans une conférence de presse, s’est confié en ces termes :« C’est un jour de fierté pour moi et ma famille, et j’espère que c’est aussi un jour de fierté pour l’Écosse, car il en dit long sur nos valeurs ». L’homme prend le pouvoir au moment où le combat pour l’indépendance s’essouffle. Avec son élection, il divise au sein de son parti le SNP et déstabilise les conservateurs (au pouvoir à Londres) mais aussi l’opposition travailliste.
Après sa victoire le 28 mars dernier, Humza Yousaf, jusqu’alors ministre de la Santé, a promis de faire partie de « la génération qui obtiendra l’indépendance » car « le peuple écossais a besoin de l’indépendance dès maintenant et plus que jamais« .
Rishi Sunak a félicité M. Yousaf. « J’ai hâte de travailler avec lui pour concrétiser les priorités qui comptent le plus pour les Écossais(…) Même si Humza Yousaf reste un privilégié dans l’ascenseur social, il affirme néanmoins avoir connu le racisme :« J’ai été victime d’une énorme quantité d’attaques en ligne et malheureusement, parfois aussi en face à face».
En 2021, avec sa seconde épouse Nadia El-Nakla, il a porté plainte pour discrimination contre une crèche qui avait refusé d’accueillir leur fille. La crèche avait démenti les accusations, mais l’organisme en charge des inspections avait jugé la plainte fondée. Le couple l’a depuis abandonnée.
Humza Yousaf assure que sa propre expérience le conduira à défendre les droits de toutes les minorités, dont ceux des homosexuels et des personnes transgenres. Il a promis qu’il ne légifèrerait pas en fonction de sa propre foi même si en 2014, il avait été accusé d’avoir sciemment évité un vote au Parlement visant à légaliser le mariage pour les couples de même sexe, sous la pression de dignitaires musulmans.
Il s’est défendu durant la campagne en affirmant qu’il avait ce jour-là d’autres engagements, et a renvoyé la balle sur une de ses rivales pour la présidence du SNP, Kate Forbes, qui assume ses idées conservatrices inspirées de son appartenance à une église évangélique écossaise.