L’Italie convoque une conférence sur la migration méditerranéenne sur le modèle tunisien

L’Italie a invité les pays méditerranéens à Rome dimanche pour une « conférence internationale » visant à prolonger un accord soutenu par l’UE avec la Tunisie pour freiner l’arrivée de migrants sur les côtes européennes.

Le Premier ministre italien d’extrême droite Giorgia Meloni s’attend à ce que les dirigeants de la région, de l’Union européenne et des institutions financières internationales se rencontrent dans la capitale, selon un communiqué de presse du gouvernement.

La liste complète des participants est inconnue, mais Meloni a confirmé la présence du président tunisien Kais Saied, tandis que les Premiers ministres égyptien et maltais, Mostafa Madbouli et Robert Abela, respectivement, ont tous deux annoncé leur présence.

Lors de la campagne électorale de 2022 qui l’a amenée au pouvoir, Meloni s’est engagée à « arrêter le débarquement » de migrants en Italie, que le gouvernement évalue à près de 80 000 arrivées côtières depuis janvier, contre 33 000 à la même période l’an dernier.

Mais alors que le gouvernement a mis des obstacles sur le chemin des navires humanitaires secourant les migrants en Méditerranée, il n’a pas réussi à arrêter les départs qui proviennent pour la plupart de Tunisie et de Libye.

L’Italie et la Commission européenne ont cherché à intensifier leur engagement avec la Tunisie, promettant un financement si le pays s’engage à endiguer l’émigration de son territoire.

Meloni a également cherché à servir d’intermédiaire entre la Tunisie – à court de liquidités et à l’aube d’une crise majeure de la dette – et le Fonds monétaire international, où un plan de sauvetage de près de 2 milliards de dollars pour le pays d’Afrique du Nord est au point mort au milieu d’une demande du FMI pour des réformes structurelles.

La semaine dernière, l’UE a signé un protocole d’accord avec la Tunisie qui prévoit 105 millions d’euros d’aide européenne directe pour empêcher le départ des bateaux de migrants et lutter contre les passeurs.

L’accord prévoit également le rapatriement d’un plus grand nombre de Tunisiens illégaux et le renvoi des migrants d’Afrique subsaharienne en Tunisie dans leur pays d’origine.

Un financement beaucoup plus important de l’UE à la Tunisie, un prêt à long terme d’environ 900 millions d’euros proposé par la Présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen en juin, est conditionné à l’approbation du prêt du FMI.

« Ce partenariat avec la Tunisie doit être un modèle pour construire de nouvelles relations avec nos voisins nord-africains », a déclaré Meloni la semaine dernière lors d’une visite à Tunis, où elle accompagnait von der Leyen et le Premier ministre néerlandais Mark Rutte.

– « Des démocraties pas parfaites » –

Un haut diplomate européen s’exprimant sous couvert d’anonymat a confirmé que l’UE espérait des partenariats similaires avec l’Égypte et le Maroc.

« Nous devons coopérer avec les pays d’Afrique du Nord, même si pour cela nous devons accepter que ce ne soient pas des démocraties parfaites », a déclaré à l’AFP un ambassadeur basé à Rome sous couvert d’anonymat.

« Il y a une unité dans l’UE sur ce principe. »

Mais Federica Infantino, chercheuse au Centre de politique migratoire de l’Institut universitaire européen de Florence, a fait valoir que le nouvel accord avec Tunis changera peu.

« Vous ne pouvez pas considérer la migration comme l’eau qui sort du robinet, à ouvrir et à fermer au gré de certains politiciens », a déclaré Infantino.

Mais pour les besoins politiques de Meloni, même si les objectifs de l’accord ne sont jamais atteints, il y a « des enjeux symboliques forts », a-t-elle ajouté.

– ‘Scène de crime’ –

Les groupes de défense des droits de l’homme et les organisations caritatives qui secourent les migrants qui tentent la dangereuse traversée de la Méditerranée restent vigilants.

« Cela montre que l’Europe n’a rien appris de sa complicité dans les horribles abus des migrants en Libye« , a déclaré jeudi Human Rights Watch.

« La Méditerranée n’est pas seulement un cimetière. C’est une scène de crime », a tweeté l’ONG allemande Sea-Watch.

Pour le chercheur indépendant Yves Pascouau, le dialogue entre l’Europe et les pays de départ des migrants est positif, tout comme les tentatives de relance des échanges et des investissements dans les énergies vertes.

Mais tant que la politique migratoire dépendra des ministres européens de l’Intérieur, la question ne sera abordée que sous l’angle de la sécurité, a noté Pascouau.

« Ce qui manque dans les relations entre l’UE et les pays tiers, c’est une réflexion à long terme », a-t-il déclaré.

Selon l’ONU, plus de 100 000 migrants sont arrivés par la mer en Europe – la plupart en Italie – au cours des six premiers mois de 2023, depuis les côtes d’Afrique du Nord, de Turquie et du Liban.

Il y a eu un peu plus de 189 000 arrivées de ce type l’année dernière.

Avec moins de 80 000 demandes d’asile enregistrées l’an dernier, l’Italie est en retard sur l’Allemagne, la France, l’Espagne et l’Autriche.

 

© Agence France-Presse

 

N'hésitez pas à partager !

Laisser un commentaire

Qu’elle s’affirme fièrement, qu’elle choque, crispe ou divise, la diversité est une réalité incontournable de nos sociétés. Elle trame nos régions, villes et quartiers et donne à voir un monde où les mobilités humaines se sont intensifiées. Divercite.be est un média belge francophone qui est né pour répondre au besoin de décrypter et d’analyser ces nouvelles réalités. Sa ligne éditoriale est entièrement et exclusivement consacrée à la diversité culturelle, ethnique, cultuelle ou de genre. Nouveau dans le paysage médiatique numérique, nous avons besoin de vous pour aller plus loin dans le travail que nous menons.
Soutenez-nous en vous abonnant ! S’abonner, c’est permettre à un nouveau journalisme d’enrichir le débat public par une vision aussi objective et sans concession, qu’humaine et proche de chacun. Divercite.be ne court pas après le buzz mais relaye l’actualité telle qu’elle est, sans parti pris.
Abonnez-vous à partir de 5 euros par mois ou 59 euros par an. Vous avez aussi la possibilité de découvrir uniquement les articles qui vous intéressent pour 1 euro.
Qu’elle s’affirme fièrement, qu’elle choque, crispe ou divise, la diversité est une réalité incontournable de nos sociétés. Elle trame nos régions, villes et quartiers et donne à voir un monde où les mobilités humaines se sont intensifiées. Divercite.be est un média belge francophone qui est né pour répondre au besoin de décrypter et d’analyser ces nouvelles réalités. Sa ligne éditoriale est entièrement et exclusivement consacrée à la diversité culturelle, ethnique, cultuelle ou de genre. Nouveau dans le paysage médiatique numérique, nous avons besoin de vous pour aller plus loin dans le travail que nous menons.
Soutenez-nous en vous abonnant ! S’abonner, c’est permettre à un nouveau journalisme d’enrichir le débat public par une vision aussi objective et sans concession, qu’humaine et proche de chacun. Divercite.be ne court pas après le buzz mais relaye l’actualité telle qu’elle est, sans parti pris.
Abonnez-vous à partir de 5 euros par mois ou 59 euros par an. Vous avez aussi la possibilité de découvrir uniquement les articles qui vous intéressent pour 1 euro.
 
 

JE SUIS DÉJÀ ABONNÉ