Kaltoum Nebbou, 24 ans, Carolo et fraichement lauréate du concours de la diplomatie belge

Kaltoum Nebbou, vient de réussir brillamment le concours de la diplomatie belge. À seulement 24 ans, c’est l’une des plus jeunes lauréates de la promotion 2022. Carolo de naissance, elle passe une grande partie de sa vie à Charleroi avant de la quitter à ses 18 ans pour étudier à Bruxelles. Diplômée en sciences politiques, elle se lance dans l’une des fonctions les plus passionnantes qui soient, mais aussi l’une des plus exigeantes :  celle d’une carrière internationale dans la diplomatie.

Entretien

Divercite.be : Qui êtes-vous Kaltoum Nebbou ?

Kaltoum Nebbou : J’ai 24 ans et je suis née à Charleroi, ce qui n’est pas commun dans le monde de la diplomatie belge (rire).  J’ai fait mes études là-bas jusqu’à mes 18 ans et ensuite je suis venue à Bruxelles où je me suis inscrite à l’ULB pour faire des études de sciences politiques et de relations internationales.

Divercite.be : Vous pensiez déjà à faire de la diplomatie à l’époque ?

Kaltoum Nebbou :  Pas nécessairement. Quand j’étais en secondaire, je me destinais à une profession libérale. Par exemple, une carrière d’avocate. Mais quand je suis arrivée à l’ULB, j’ai eu quelques contacts avec le monde de la diplomatie. Lorsque je suis allée au Canada pour mon Erasmus, la fac où j’étais avait organisé un événement avec des consuls, des ambassadeurs… C’est là que j’ai vraiment compris que je pouvais aussi faire ça.

De retour à Bruxelles, j’ai lancé une ASBL qui avait pour but la démocratisation de l’accès à la diplomatie. Elle porte le nom de Comité diplomatique et est toujours en activité aujourd’hui. Nous étions 28 employés bénévoles avec une communauté de 200 à 300 étudiants et jeunes professionnels, qui étaient intéressés par la diplomatie et qui faisaient face à un certain plafond de verre.

Dans certains cas, c’était un plafond de verre géographique. Quand on vient de Liège, de Charleroi ou de La Louvière par exemple, cela peut être un obstacle pour rentrer dans la « Brussels Bubble ». La barrière peut aussi être en lien avec le genre. On a tendance à considérer que le métier de diplomate est un métier masculin, alors qu’on assiste à une féminisation progressive de la carrière, à bien des égards. D’autres variables peuvent être citées, telles que des éléments liés aux origines, la religion… On a parfois du mal à imaginer que l’on puisse devenir diplomate si notre famille a un héritage culturel différent. Or, on se rend de plus en plus compte que cela peut être vu et utilisé comme une force plutôt qu’une faiblesse.

Divercite.be : Quelles sont les différentes étapes à passer ?

Kaltoum Nebbou :  Au niveau du ministère, c’est un processus en plusieurs étapes, parfois très longues. Dès qu’il y a un certain nombre de postes qui sont vacants, l’institution se met à la recherche de nouveaux profils. Elle ouvre alors ce qu’on appelle « un concours diplomatique », organisé sous la houlette du service public fédéral et de son Selor, devenu «Travaillerpour.be », qui organise toute une série d’examens pour sélectionner les 15 à 30 meilleurs profils.

Avant de pouvoir s’inscrire au concours, il y a certains prérequis : avoir un diplôme de master et parler le français, l’anglais, le néerlandais, ainsi qu’une 4e langue au choix.

La suite se fait sans surprise : un volet linguistique avec des examens de néerlandais et d’anglais tout au long de la sélection. Un deuxième volet, plus générique, comprend des tests informatiques : test de raisonnement verbal, abstrait, aptitudes administratives et comportementales.

Là où le bât blesse, ce sont les examens orientés vers les sciences politiques, le droit, la diplomatie et l’économie. Les deux épreuves magistrales « la conférence » et le « Grand Oral » amènent beaucoup de stress parmi les candidats, étapes où nos compétences d’analyses, compréhensions, négociations et éloquences sont mises à l’épreuve. Pour notre promotion, le sujet de la conférence était « coopération au développement » ; thème plus que jamais d’actualité pour notre pays.

En ce qui concerne le Grand Oral, j’ai eu droit à un sujet auquel je ne m’attendais absolument pas et que je n’avais pas du tout préparé : le Brexit. J’ai eu la chance de pouvoir me rabattre sur mes connaissances générales et spécifiques, obtenues pour la plupart via un suivi assidu de l’actualité et durant mon master de spécialisation en macroéconomie européenne à l’IEE à Bruxelles.

D’autres questions subsidiaires sont posées durant l’épreuve : motivation, compréhension du monde de la diplomatie et circonstances familiales sont discutées afin de permettre au jury (4 personnes, dont 3 diplomates de carrière) d’évaluer notre potentiel degré d’insertion au sein du corps diplomatique belge.

Divercite.be : Vous êtes sur liste d’attente après cela ?

Kaltoum Nebbou :  Bien heureusement, non. J’ai eu la chance d’être classée parmi les 30 meilleurs profils francophones du concours et je débute donc en août 2023. Je sais qu’il y a encore quelques places pour des francophones, étant donné qu’une petite partie des diplomates en fonction actuellement ont atteint l’âge de la retraite et libèrent donc certains postes, d’où le lancement conjoint par le SPF Affaires Étrangères et Travaillerpour.be d’un concours diplomatique en 2023, seulement un an après le nôtre.

Au niveau des néerlandophones, cela est beaucoup plus difficile. De mémoire, il me semble que 94 candidats ont été lauréats de la sélection 2022, avec uniquement 30 personnes invitées à commencer ce mois d’août. Pour le reste, ce sera un yoyo émotionnel et professionnel que je ne souhaite à personne.

Divercite.be : Une mission à l’étranger prévu pour vous ?

Kaltoum Nebbou :  Nous recevrons nos affectations pour notre premier poste à l’étranger dans le courant de l’année 2024 (premier semestre, pour préparer un départ pour septembre 2024).

Toutefois, nous ne chômerons pas durant l’année qui arrive : nous serons en « stage diplomatique », année intensive où nous recevrons tous les enseignements nécessaires pour l’exercice de notre fonction à l’étranger. Stage consulaire, exercices dans la coopération au développement, présidence belge de 2024, visites officielles auprès des acteurs de la société belge : notre année sera axée sur la pratique, le SPF partant du principe que nous possédons le bagage théorique nécessaire pour être diplomate, avec un examen en fin de cursus reprenant tous les domaines explicités durant l’année de stage.

En parallèle, nous recevrons alors la liste des postes vacants avec la possibilité de sélectionner jusqu’à 7 préférences (s’il n’y a pas eu de changement depuis la promotion 2020) C’est à ce moment-là également que nous recevrons le fameux laissez-passer inhérent à notre domaine : le passeport diplomatique !

Divercite.be : La plus jeune de la promo 2022 ?

Kaltoum Nebbou :  Une des plus jeunes en tout cas. Je ne connais pas encore tous les autres lauréats, mais je sais que l’âge moyen des lauréats diplomates est de 33 ans – mais nous assistons également à un certain rajeunissement de la carrière, de quoi amener un bol d’air frais dans une carrière vieille de plusieurs siècles.

Divercite.be : Des parents qui doivent être vraiment fiers ?

Kaltoum Nebbou : Oui, surtout ma maman qui est aux anges. Quand je lui ai annoncé la bonne nouvelle, elle s’est mise à pleurer.

 

Kaltoum Nebbou, 24 ans, est lauréate de la sélection 2022 du concours diplomatique belge. Travaillant actuellement comme rédactrice en chef d’un magazine économique appartenant à une chambre de commerce active dans les pays ACP, elle est la fondatrice du Comité Diplomatique, une association visant à démocratiser l’accès au monde de la diplomatie pour les étudiants et jeunes professionnels. Elle siège désormais dans le conseil d’administration d’autres organismes, tels que le Club Diplomatique de Belgique, fondé dans les années 80, et y organise conférences et dîners pour la communauté diplomatique de Bruxelles. Son intérêt pour la diplomatie apparait lorsqu’elle était étudiante à l’Université libre de Bruxelles. Après avoir terminé son cursus de sciences politiques entre Montréal et Bruxelles, elle entame des études en relations internationales et en macroéconomie européenne avec pour ambition de détenir les clés de compréhension nécessaires à la lecture, l’analyse et l’exercice des relations internationales sur l’échiquier politique contemporain.

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