Le président tunisien, Kaïs Saïed, ne veut plus de migrants subsahariens dans son pays

 Le président tunisien, Kais Saidi, fait beaucoup parler de lui ces dernières 24 h. Lors d’une réunion, il s’est accordé la liberté d’évoquer la migration subsaharienne de manière violente et raciste. S’il est vrai que le nord de l’Afrique reste la porte de sortie pour atteindre les côtés Européennes, beaucoup parmi les migrants restent et vivotent dans le Maghreb en attendant des jours meilleurs. La délinquance que la pauvreté suscite est une réalité. La violence comme moyen de combattre la foire d’empoigne dans les grandes villes, certainement pour quelques uns, la seule réponse immédiate, mais les propos d’un chef d’État pour la décrire doivent être mesurés et le fruit d’une longue réflexion pour apaiser les tensions et non pas pour les enflammer.

Qui est Kaïs Saïed ? On sait que son père, Moncef Saïed, avait protégé Gisèle Halimi, encore très jeune, des nazis. Durant l’occupation allemande de la Tunisie entre le 17 novembre 1942 et le 13 mai 1943, selon ses dires, « son père tenait à accompagner Gisèle Halimi qui avait alors 15 ans, au lycée avec sa bicyclette » pour la protéger des Nazis. La famille de l’actuel président tunisien était modeste, mais l’un de ses oncles paternels, Hicham Saïed, fut le premier chirurgien pédiatre de Tunisie, mondialement connu pour avoir séparé des siamois dans les années 1970. Une famille intellectuelle et humaniste de ce que l’on sait de lui.

 Des ONG ont dénoncé son discours « raciste et haineux » sur les migrants.

C’est donc avec une charge violente que le président Saied s’est adressé aux membres présents lors de sa réunion mardi dernier. Sa diatribe visait les migrants originaires d’Afrique subsaharienne, qu’il a définie comme « une menace démographique pour son pays ». Pour lui, des mesures urgentes doivent être prises pour stopper le plus vite possible « l’immigration clandestine de ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne ».

Dans son discours généraliste, il affirme que leur présence en Tunisie est source de « violence, de crimes et d’actes inacceptables ». Il n’a pas hésité non plus à utiliser le terme de « hordes de migrants clandestins » et a insisté sur « la nécessité de mettre rapidement fin à cette immigration. » Comment ? La méthode n’a pas encore été explicitée, préférant pour le moment énoncer son observation.

Il a également affirmé que cette immigration clandestine relevait d’une « entreprise criminelle ourdie à l’orée de ce siècle pour changer la composition démographique de la Tunisie afin qu’elle soit considérée comme un pays africain seulement et estomper son caractère arabo-musulman« .

Autant dire que ce discours du grand remplacement a fait des admirateurs, à l’image d’Eric Zemmour qui a tweeté mercredi 22 février: «Les pays du Maghreb eux-mêmes commencent à sonner l’alarme face au déferlement migratoire. Ici, c’est la Tunisie qui veut prendre des mesures urgentes pour protéger son peuple. Qu’attendons-nous pour lutter contre le Grand Remplacement ? »

Romdhane Ben Amor qui est le porte-parole du Forum tunisien pour les droits économiques et sociaux s’est exprimé lui aussi pour dire que : » ce discours raciste et haineux marque un jour triste. Le fait que le président d’un pays signataire de conventions internationales sur l’immigration tienne un tel discours est extrêmement grave. »

Les observations du président tunisien Saied ont pour but de travailler à des mesures urgentes qui doivent être mises en place pour faire barrage aux migrants clandestins. Les autorités affirment qu’il y aurait eu entre la nuit de mardi à mercredi 138 migrants clandestins arrêtés ou interceptés.

Selon des chiffres officiels, la Tunisie compte 12 millions d’habitants et  21.000 ressortissants de pays d’Afrique subsaharienne, majoritairement en situation irrégulière.

Le discours de M. Saied, qui concentre tous les pouvoirs après avoir suspendu en juillet 2021 le Parlement et limogé le gouvernement, survient alors que le pays traverse une grave crise économique marquée par des pénuries récurrentes de produits de base, sur fond de tensions politiques.

« Le président instrumentalise la crise des migrants pour détourner l’attention de l’opinion publique des questions économiques et sociales en inventant un nouveau danger« , affirme M. Ben Amor.

Mostafa Abdelkebir, le président de l’Observatoire tunisien des droits de l’Homme a réagi sur les réseaux sociaux en affirmant que « Ce discours ne ressemble en rien à la Tunisie. Le standing international de la Tunisie et son histoire humanitaire sont beaucoup plus grands que ce discours. »

D’autres associations tunisiennes ont réagi en qualifiant de « discours de racisme et de haine et d’incitation à la violence contre les migrants subsahariens. »

Dans un communiqué conjoint, 18 autres ONG et associations, dont la Ligue tunisienne des droits de l’Homme, ont exprimé leur « solidarité pleine et inconditionnelle avec les migrants subsahariens et leurs défenseurs », estimant que le discours du président Saied rappelait « l‘époque des camps d’extermination nazis de la Seconde Guerre mondiale ».

 

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