S’unir, fédérer, joindre ses forces pour créer une dynamique nouvelle, les pays européens l’ont imaginé et réalisé depuis la sortie de la deuxième guerre mondiale. Se lever comme un seul homme pour revendiquer une attente qui sera bénéfique pour tous, c’est dans l’alliance que les Européens l’ont imaginé avec l’Union européenne, les Américains du Sud avec l’Union des nations sud-américaines ou encore les nations d’Asie avec L’ASEAN (Association des nations de l’Asie du Sud-Est). Si l’Afrique avec l’Union africaine (dont le siège est à Addis Abeba en Éthiopie) tente, vaille que vaille, de faire entendre une (sa) voix lors de sommets qui concernent les pays africains, l’UMA, l’Union du Maghreb Arabe est en état de mort cérébrale depuis sa création il y a plus de 30 ans.
Petit retour en arrière. Le 17 février 1989, la déclaration instituant l’Union du Maghreb Arabe (UMA) a été signée à Marrakech par les cinq chefs d’État de l’époque, présidents de la Mauritanie, la Libye, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc. Le traité était alors entré en vigueur le 1er juillet de la même année. À la signature du Traité, les pays membres acceptaient de coordonner et d’harmoniser leurs politiques pour un développement durable dans tous les secteurs des activités des pays concernés. Une belle idée, un grand pas dans la volonté d’avancer pour construire des nations plus fortes, moins sujettes aux attaques extérieures.
Des mois de discussions et de préparations avec déjà, avant le sommet de Marrakech, une réunion à Zeralda, en Algérie, le 10 juin 1988. Les décisions qui y furent prises alors étaient « la constitution d’ un Comité chargé de définir les moyens permettant la création d’une union des cinq États du Maghreb Arabe« . Les travaux de la Grande Commission ont constitué, par la suite, le programme essentiel du travail à court et à moyen terme de l’UMA.
En plus de la signature du traité, le Sommet de Marrakech avait adopté une Déclaration solennelle sur la création de l’UMA et imaginé un programme de travail de l’Union : La consolidation des rapports de fraternité qui lient les États membres et leurs peuples, la réalisation du progrès et du bien-être de leurs communautés et la défense de leurs droits, la réalisation progressive de la libre circulation des personnes des services, des marchandises et des capitaux entre les États membres, l’adoption d’une politique commune dans tous les domaines…
Le travail pour la mise en place de l’UMA n’a pas été laissé au hasard, tout fut soigneusement pensé comme : un conseil suprême (dit conseil de la présidence), un Conseil Consultatif, un Secrétariat général, un Comité de Suivi, une Réunion des Premiers ministres, un Conseil des ministres des Affaires Étrangères, des Commissions ministérielles spécialisées, des instances judiciaires… Jusqu’à avoir même imaginé une « Université maghrébine » ainsi qu’une « Banque maghrébine d’Investissement et du Commerce extérieur » (BMICE).
Dans les souhaits émis, il était fait mention de l’institution d’une zone de libre-échange avec le « démantèlement de l’ensemble des obstacles tarifaires et non tarifaires au commerce entre les pays membres ». Ce projet prévoyait également la mise en place d’une union douanière qui serait utile à l’institution d’un « espace douanier unifié » avec adoption d’un tarif extérieur commun vis-à-vis du reste du monde. Beaux projets donc, belles utopies, mais aujourd’hui, près de 34 ans après et malgré des tentatives ponctuelles, c’est un grand flop !
Les égos, les nationalismes, les bras de fer perpétuels
Les raisons de l’absence d’une union des pays du Maghreb sont complexes et, si l’on ne veut pas utiliser les simplissimes, disons aussi qu’ils sont multifactoriels. Les relations entre les différents pays de la région ont été historiquement marquées par des tensions politiques et économiques, ce qui a rendu difficile la mise en place d’une coopération régionale étroite. Ajoutons à cela des facteurs externes tels que l’instabilité politique dans certains pays et les conflits régionaux qui ont également entravé les efforts pour une Union.
Des acteurs de la région continuent de défendre une Union des pays du Maghreb, avançant les arguments que cela pourrait peut-être amener une meilleure sécurité, un meilleur développement économique et une coopération régionale plus efficace. Tout cela, c’est sans compter sur l’égo du Maroc et de l’Algérie qui n’arrivent pas à dépasser les rancunes du passé et qui pour cela tirent chacun la couverture à soi sous le regard impatient des autres pays qui pourraient trouver en cette Union un véritable nouveau souffle.
Les observateurs, à l’aulne des décennies écoulées depuis les premiers accords, estiment que la création d’une Union des pays du Maghreb nécessiterait un certain nombre de conditions préalables. Insurmontables … sauf si les volontés sont plus fortes : 1- Création d’une stabilité politique et économique dans la région. 2- Une réduction des tensions régionales. 3- Une coopération plus étroite dans les domaines de la sécurité et de la lutte contre le terrorisme, ainsi qu’une volonté politique plus forte de la part des dirigeants des pays membres.
Conditions préalables donc, mais c’est l’Everest à gravir quand on sait que cette région du monde reste la plus instable en termes de conflits tribaux et résurgences de groupes terroristes ou trafiquants en tous genres. Last but not least, la question du Sahara occidental participe à la difficulté de l’UMA à atteindre ses objectifs.
En conclusion, les cinq pays membres ont des intérêts et des priorités différentes, qui sont souvent en conflit les uns avec les autres. La belle idée d’un Maghreb uni reste pour l’instant une utopie.