Aujourd’hui, premier vendredi depuis la mort des deux touristes suédois assassinés par Abdesalem Lassoued, toutes les mosquées de Belgique doivent réagir lors du prêche et évoquer la mémoire des victimes.
Notre pays a une nouvelle fois été la proie d’un acte de terreur au cœur de sa capitale. Un fou armé a abattu froidement deux touristes venus chez nous pour soutenir leur équipe de football qui jouait un match contre la Belgique. Les images sont glaçantes, un sang-froid inouï d’un individu qui, muni d’une arme de guerre, a assassiné deux hommes puis a pris la fuite, traversant la ville avec sa kalachnikov sous le bras.
Les crimes terroristes, ces dernières années, sont commis à travers le monde au nom de l’islam. Un islam dont ces meurtriers se prévalent et qui met la communauté musulmane dans une position de fragilité extrême.
La foi est un sentiment qui se vit et qui, pour beaucoup, n’est pas exprimable par des mots ou des discours. À chaque attentat, à chaque tuerie de masse, nos concitoyens musulmans sont exhortés à aller vers un terrain où ils ne sont pas toujours le plus à l’aise, celui de la justification.
Devant la machine à café, dans la cour de récréation, sur les monticules d’un chantier… La question facile « c’est ça l’islam ? » qui sera immanquablement posée, ne suscitera encore et toujours qu’une phrase toute faite «non, ce n’est pas ça l’islam» sans que celui incité à répondre n’ait d’autres arguments à avancer, dans l’urgence.
Tous les musulmans n’ont pas le vocable idoine pour déconstruire les préjugés dont ils sont victimes. Tous les croyants ne savent pas verbaliser la force d’une croyance qui transcende la violence commise par des fous furieux qui n’ont qu’à prononcer « Allah est grand » avant d’assassiner pour être reconnus musulmans.
Il faut une force incroyable aux croyants de l’islam pour mettre une distance, au jour le jour, entre les amalgames (légions depuis le 11 septembre 2001) et la vie avec ce qu’elle exige d’obligations quotidiennes.
Cet islam de Belgique c’est la communauté musulmane qui a le devoir de le construire. S’il ne sera jamais possible de fédérer tous les acteurs du monde religieux autour d’un socle commun, il y a des actes devant lesquels ils ne peuvent se départir. Nous construisons tous et ensemble un château de cartes qu’un illuminé, d’un souffle, vient d’étaler sans crier gare.
Dire à l’unisson, quelles que soient les écoles religieuses, que ces actes relèvent de la barbarie dans ce qu’elle a de plus ignoble (et non pas d’une philosophie religieuse dont les desseins ont pour ambition d’offrir un équilibre de vie au croyant) doit se marteler chaque vendredi. Les responsables des mosquées ont cette lourde responsabilité et ils ne doivent pas s’y dérober.