La Turquie avait été la première à ratifier la convention d’Istanbul, le 14 mars 2012, et elle sera également la première à se retirer.
Le président Erdogan, dans un décret publié dans la nuit du vendredi 19 mars, a décidé de retirer son pays de la convention. Marija Pejčinović Burić, Secrétaire générale du Conseil de l’Europe, juge cette décision « d’autant plus déplorable qu’elle compromet la protection des femmes en Turquie, en Europe et au-delà ».
Que dit la convention d’Istanbul ?
Une femme sur 3 soit 33 % dans l’Union Européenne a subi des violences physiques ou sexuelles depuis l’âge de 15 ans. 75 % des femmes qui exercent une profession ou qui occupent des fonctions d’encadrement supérieur ont été harcelées sexuellement et une femme sur dix a été victime de harcèlement sexuel ou de traque par le biais des réseaux sociaux. Riche de ce constat, le Conseil de l’Europe initie la Convention d’Istanbul afin de légiférer de manière global avec les pays de l’UE contre les violences, y compris les crimes et délits qui touchent de façon disproportionnée les femmes, comme le viol, le harcèlement et les violences domestiques qui constituent des violations flagrantes des droits humains et des atteintes à la dignité humaine, à l’égalité des sexes et au respect de soi.
Ces violences sont au centre des préoccupations de nombreux états depuis des années. Des progrès ont été faits dans un nombre considérable de pays européens mais avant 2014, il n’existait aucun cadre général entre les différents pays. La convention, adoptée à Istanbul en 2011 (avec une entrée en vigueur en 2014), offre désormais un outil commun à tous les pays la ratifiant. Depuis septembre 2020, tous les États membres de l’Union Européenne ont signé la convention et 21 d’entre eux l’ont ratifiée, (bien que la Pologne ait fait part de son intention de se retirer). Le choix de La Turquie d’y renoncer vient d’un responsable du parti au pouvoir du président Erdogan qui a soulevé la question de la pertinence de ce traité. Depuis, des femmes sont descendues dans les rues d’Istanbul et d’autres villes de Turquie, appelant le gouvernement à s’en tenir à la Convention mais en vain.
Le principal parti d’opposition CHP a critiqué cette décision et sa vice-présidente chargée des droits humains, Gokce Gokcen, a tweeté que l’abandon de cette Convention signifiait « laisser les femmes être tuées« .
Pour la ministre de la famille turque, Zehra Zumrut Selcuk, « La Constitution et la réglementation intérieure de la Turquie seraient la garantie des droits des femmes« .
La violence domestique et le féminicide restent un problème grave en Turquie. En 2020, 300 femmes ont été assassinées d’après le groupe de défense des droits We Will Stop Femicide.